courbes; il les a mêlées à des formes animales, à des feuillages, à des
arabesques fantastiques, selon que, poussé par ses affinités symboliques, il
en a voulu l'ombre sans tenir compte des invraisemblances ou des contresens de
pareils accouplements. Il est et demeure un art monophysite, de même qu'avait
été l'art de l'Égypte antique ou celui de l'Égypte copte, quand le schisme
du concile de Chalcédoine fut devenu pour elle un dogme et qu'elle se fut
séparée du reste de l'Orient chrétien pour toujours.
Cet atavisme, dont tant d'historiens d'art ont fait bon marché, c'est lui
qu'on retrouve à chaque pas dans l'art arabe. Aux temps antiques, les dieux
apparaissent incarnés sous forme humaine ou animale, mais conventionnelle,
rigide et hiératique; rien alors ne les rattache à l'humanité. Par contre,
l'homme se dessine et se meut avec une vérité toute naturaliste, en tant
toutefois qu'il n'est pas encore momie, c'est-à-dire qu'il ne s'est pas
encore confondu avec la divinité.
Chez le Copte, cette inclination arrive à son paroxysme. Cette loi de
l'Évangile qui veut que la société soit basée sur l'amour, amour de Dieu
et amour du prochain, mène l'ascète à la contemplation. La divinité
incréée n'a pour lui aucun contour déterminé, c'est l'infini avec le calme
immuable que la nature imprime à l'Égypte, l'inéluctabilité des choses
dont j'ai parlé plus haut et qui avait déjà éveillé dans l'âme du
paganisme l'idée des recommencements éternels. Aussi le premier soin du
Copte est d'en chercher le symbole dans les formes abstraites, dans les images
qui ne parlent qu'à l'âme. Après lui l'Arabe hérite de toutes ses
croyances et, devenu par la géométrie maître du maniement des figures
polygonales, trouve dans le dédale de la philosophie des lignes cette
impression de l'immuable et de l'invisible, où vient, par la superposition de
l'entrelacs, se greffer l'idée de l'évolution des choses tournant dans un
cercle inflexible dont elle ne s'écarte jamais.
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